Interview Arseg : « Nous devons payer le juste prix par rapport à un cahier des charges »
Quel a été le rôle de l’Arseg dans l’élaboration de cette charte ?
La charte a été portée par la FEP qui souhaitait nous sensibiliser au sujet de l’achat responsable de propreté avec le Conseil national des achats (CNA). Nous avons alors été impliqués en tant qu’association de donneurs d’ordres et acheteurs de prestations de propreté. Pour ce faire, un groupe de travail a été constitué avec Joël Larousse et Thierry Cadiot, deux membres de notre comité exécutif*. Après plusieurs séances de travail communes entre nos associations, la charte a pu être corédigée. Son contenu et ses éléments de langage ont été choisis par chaque partie prenante. Pour nous, cela représente la concrétisation de la démarche que nous avions engagée lors du premier confinement en faveur de plus de solidarité entre donneurs d’ordres et prestataires. Il était important de montrer que l’Arseg s’inscrit dans une politique RSE et s’implique d’une part dans une approche solidaire vis-à-vis de nos prestataires, nos membres associés, et d’autre part vis-à-vis de nos adhérents membres actifs. Et cela passe notamment par une politique d’achat efficace et responsable.
Quels sont les principaux engagements pris avec cette charte ?
Nous avons tenu à rappeler certaines évidences comme respecter les salariés de la propreté, mobiliser l’expertise technique et organisationnelle des entreprises de propreté, être réceptif aux innovations… (lire aussi l'encadré ci-dessous). Mais les deux points les plus importants selon moi, et qui étaient très attendus par les parties prenantes et notamment les syndicats, étaient premièrement de favoriser le travail en journée continue, de co-construire la prestation non seulement avec l’entreprise de propreté mais aussi avec les salariés. Ensuite, nous avons tenu à rappeler l’importance de la recherche du mieux disant social et sociétal. C’est-à-dire payer le juste prix, ne pas se retrouver dans une relation où l’on serre les prix et où les entreprises n’ont plus de marge suffisante pour vivre. Car nous sommes, en quelque sorte, responsables du pouvoir d’achat des salariés. Nous devons donc payer le juste prix par rapport à un cahier des charges que l’on va rédiger avec les directions des achats. Pour cela, les DET peuvent s’appuyer sur les Buzzy Ratios publiés par l’Arseg. Il est important de veiller à ce que, dès le départ, le contrat soit bien construit avec les directions achats car ce sont nous, les directeurs de l’environnement de travail, qui allons le faire vivre par la suite.
Est-ce que la propreté à l’usage, tendance qui pourrait s’accroître avec le développement du travail hybride, ne risque pas de tirer les prix vers le bas ?
Justement, la charte est là pour éviter des pratiques qui pourraient aller dans ce sens. Je tiens à rappeler que nous sommes responsables de nos prestataires, à travers le document unique, les contrats, les plans de prévention… Depuis le début de la crise sanitaire, nous avons tous dû augmenter nos prestations d’hygiène pour rassurer les collaborateurs, avec la mise en place de désinfections plus régulières notamment. Cela a évidemment augmenté le coût des prestations. Et je pense que cela va perdurer après la crise sanitaire, avec le déploiement du flex office. Les salariés changeant de postes de travail plusieurs fois par jour, cela demandera de désinfecter les bureaux beaucoup plus régulièrement. L’un des axes majeurs de la charte est le travail en journée. Où en est-on aujourd’hui dans les entreprises ? Cela reste encore marginal, embryonnaire. Mais la charte est justement là pour inciter à le déployer dans nos entreprises. Par ailleurs, nous sommes tous impliqués dans des programmes RSE et fournissons des rapports en fin d’année où nous devons montrer ce que l’on a pu faire en matière de RSE. Le travail en journée s’inscrit tout à fait dans cette démarche car c’est une façon de protéger et de respecter le personnel. Je pense que cela peut permettre d’impulser un mouvement vers plus de nettoyage en journée.
Y a-t-il déjà d’autres étapes prévues pour aller plus loin dans cette démarche de solidarité ?
Je pense que cette charte est un très bon modèle à dupliquer. La force de ce type de projet est de réunir l’ensemble des parties prenantes autour de la table. Nous allons donc essayer de continuer à élaborer ce type de charte responsable avec d’autres métiers comme la maintenance, l’accueil, la sécurité… Il est, selon moi, important de co-construire la même démarche avec d’autres métiers qui ont eux aussi besoin de visibilité, d’encouragement, d’aide.
(*) Joël Larousse est vice-président en charge du projet associatif et Thierry Cadiot est en charge de la formation, des études et de la prospective.
Les principes fondateurs de la charte
► Prendre en compte les enjeux RSE sectoriels du secteur de la propreté
► Veiller à une relation équilibrée avec ses prestataires
► Mobiliser l’expertise technique et organisationnelle des entreprises de propreté
► Favoriser le travail en journée/en continu
► Être réceptif aux innovations écologiques, contribuer à la réduction de l’impact de la prestation sur l’environnement, dans sa globalité et non uniquement celle des opérations réalisées sur le site
► Mettre en cohérence la recherche du mieux disant social et sociétal avec les choix en termes de prix
► Favoriser les critères qualité, notamment en prenant en compte la qualité globale de la prestation et en faisant prévaloir le critère technique sur le critère prix
► Veiller au respect strict des obligations techniques et réglementaires
► Intégrer dans les contrats les conséquences de la caractéristique sectorielle du transfert conventionnel régi par l’article 7 de la convention collective nationale (CCN)
► Appliquer les recommandations proposées sur le site achat propreté sur les trois étapes de la démarche d’achat : au moment de la consultation (notamment autour de l’expression des besoins), pour faire le bon choix, puis pour bien suivre et évaluer la prestation.