
Geoffroy Roux de Bézieux, président du Medef et François Asselin, président de la CPME.
Geoffroy Roux de Bézieux, la FEP est adhérente au Medef. Que représente pour vous cette adhésion et quels sont les grands moments marquants que vous retenez ?
G. R-de-B. : Tout d’abord, permettez-moi de vous faire part en mon nom et celui du Medef de la joie que nous avons de compter la FEP parmi nos adhérents et il y a peu encore, de compter Philippe Jouanny comme membre du Conseil exécutif. Tout au long de la crise sanitaire, les entreprises de propreté et leurs salariés ont montré aux yeux de tous leur importance, leur sens des responsabilités et leur capacité d’adaptation. Elles ont permis notamment, lors du retour des collaborateurs en présentiel, de trouver un cadre de travail optimal, assaini et sécurisant. Les guides que vous avez rédigés en matière d’hygiène au travail, à destination des entreprises et de leurs salariés, ont contribué durant la crise Covid à diffuser les gestes barrières et à adopter de bonnes pratiques à même de faire reculer l’épidémie. À l’image des entreprises dans leur globalité, les entreprises de propreté, au sortir de cette crise, ont bénéficié d’une image renforcée auprès du grand public, leur action étant jugée essentielle. Pour que la profession puisse pleinement exprimer son rôle d’apporteur de solutions et de contributeur à l’intérêt général, le Medef est aux côtés de la FEP et de ses adhérents. Nous l’avons été tout au long de la crise, mais aussi dans le cadre du projet de loi Gestion de la sortie de crise sanitaire, de la loi Rixain, la loi Santé au travail mais aussi plus récemment du PLFR 2021 et du PLF 2022.
François Asselin, comment décrire la relation entre la FEP et la CPME ?
F. A. : La FEP est adhérente de la CPME. Depuis longtemps, nous avons tissé un lien proche, car nous nous mobilisons pour défendre les 14 000 TPE-PME qui composent le paysage économique de la propreté. Au-delà des nombreux travaux communs, j’ai un excellent souvenir du salon Europropre en 2019, auquel vous m’aviez invité. Actuellement, nous travaillons sur le projet de décret relatif à la mutualisation du suivi de l’état de santé des salariés multi-employeurs et occupant des emplois identiques.
Quelles sont, pour le Medef, les principales conséquences de la crise Covid sur notre économie de façon globale, et plus précisément sur le secteur de la propreté ?
G. R-de-B. : Maintenant que le plus dur de cette crise inédite, espérons-le, est derrière nous, nous pouvons en tirer quelques enseignements. D’un naturel optimiste, je commence par les points positifs. Cette crise a mis en avant la formidable réactivité des entreprises, qui, du jour au lendemain, ont bouleversé leur fonctionnement, ont mis leurs salariés en télétravail, pour celles dont l’activité le permettait, avec comme seul objectif de nous permettre de continuer à nous approvisionner, à vivre tout simplement, tout en garantissant la santé de leurs collaborateurs. Face aux pénuries de masques et de gel, ce sont aussi elles qui ont eu la réponse en en produisant spontanément. Dans le même temps, la crise a mis en lumière des situations de dépendance au niveau de nos chaînes de valeur. C’était à ce titre particulièrement frappant concernant la production de vaccins, de principes actifs, mais aussi de semi-conducteurs. Nous devons en tirer tous les enseignements, et cela appelle à un retour à la régionalisation de ces chaînes de valeur. Si l’on zoome sur les entreprises de propreté, la crise, et en particulier sa sortie, a mis en exergue de grandes difficultés de recrutement, avec plus de 50 000 emplois à pourvoir en CDI en 2022, qui ne trouvent pas preneurs. La propreté est un acteur essentiel de nos sociétés je l’ai dit, et il est important qu’un travail de reconnaissance et de valorisation soit mené.
François Asselin, comment décririez-vous le rôle du secteur de la propreté durant la crise sanitaire ?
F. A. : Il a été essentiel ! Les entreprises du secteur de la propreté interviennent dans tous les lieux de vie et de travail du quotidien : bureaux, immeubles, écoles, transports, établissements de santé, chaînes de production et commerces. Elles offrent un environnement sûr et agréable pour les Français et un niveau d’hygiène sécurisant. Au regard de l’engagement des entreprises au service de la santé et de la qualité de vie des Français, ce secteur au fort capital humain est donc stratégique pour permettre la continuité de la vie sociale et économique du pays. Et je ne suis pas le seul à faire ce constat : 83 % des Français considèrent que la garantie de propreté et d’hygiène dans les lieux publics est indispensable pour éviter de nouvelles crises sanitaires. Pendant la crise Covid, la FEP a travaillé à l’élaboration du guide de bonnes pratiques avec le gouvernement à destination des entreprises et des salariés.
Au lendemain de l’élection présidentielle, quels sont, pour le Medef, les enjeux et les attentes des entreprises de services vis-à-vis du nouveau gouvernement ?
G. R-de-B : Aujourd’hui, les deux principales préoccupations des chefs d’entreprise que je rencontre quotidiennement, sont l’inflation et les difficultés de recrutement. Pour remédier à ces deux difficultés, un travail de valorisation et d’attractivité est à mener. À ce titre, je porte actuellement deux principaux messages auprès de la puissance publique. Le premier, c’est que concernant l’augmentation des salaires, dans des professions où la masse salariale représente le plus gros des coûts, il faut que l’État joue le jeu dans ses appels d’offres. On ne peut pas continuer à exiger des augmentations de salaires si les critères fixés par les marchés publics continuent à encourager les acteurs qui proposent les prestations les moins chères, et par corollaire les salaires les moins élevés. L’attractivité de cette profession passe aussi par les conditions de travail, c’est la raison pour laquelle j’appelle toutes les entreprises à favoriser le nettoyage sur les horaires de travail traditionnels, en journée et non pas très tôt le matin ou tard le soir. Nous l’avons fait au siège du Medef. Ça demande certes une petite adaptation, mais ça change littéralement la vie des salariés de la propreté qui retrouvent des horaires de travail normaux et non plus en décalé.
Pour la CPME, quelles sont les conséquences à craindre de la crise Covid pour les TPE et PME et les enjeux et attentes des entreprises vis-à-vis du nouveau gouvernement ?
F. A. : Je salue le dynamisme de la FEP, qui a organisé une Conférence de Progrès le 8 septembre 2021 sous le parrainage du gouvernement, en présence de la ministre du Travail, de l’Emploi et de l’Insertion Mme Élisabeth Borne, pour inciter l’acheteur public à faire évoluer ses pratiques en matière d’achat de propreté, afin de dégager des perspectives pour la revalorisation des conditions de travail des salariés du secteur et leur visibilité. Cette conférence a abouti à la signature d’une déclaration commune des partenaires sociaux et d’une charte d’engagement des principaux réseaux d’acheteurs publics CNA et Arseg.
Comme bien d’autres secteurs de l’économie, les entreprises de propreté sont actuellement en butte à des difficultés de recrutement, sujet qui nous mobilise depuis plusieurs mois à la CPME. Une enquête du Monde de la Propreté – Opinionway évalue le besoin à près 53 000 emplois en CDI à pourvoir en 2022 dans le secteur. Comment répondre à cette problématique ? Par la visibilité, la revalorisation de ces métiers dans l’inconscient collectif, mais aussi par la reconnaissance. Parmi les « 22 solutions 2022 » du Livre Bleu de la FEP, la proposition n° 22 vise à créer un interlocuteur gouvernemental unique des entreprises de services avec un ministère dédié et de plein exercice qui constitue une solution de gouvernance et de bon sens dans un paysage institutionnel trop éclaté.
Les entreprises de propreté et leurs salariés ont montré aux yeux de tous leur importance et leur capacité d'adaptation.
L’enjeu économique clé demeure celui du prix. Injonction paradoxale entre les clients publics et privés qui tirent les prix vers le bas et la nécessité de revaloriser les salaires. Or, la marge de manœuvre est faible comme le soulignait Philippe Jouanny, président de la FEP dans Le Monde (29/04/2022) : « Quand vous faites entre 1 % et 3 % de marge et que votre masse salariale représente 80 % du prix de la prestation, si vous augmentez les salaires de 2 % , vous ne faites plus de marge ! »
Au sein de la CPME, nous avons publié début juin un « pack pouvoir d’achat ». Il s'agit d'une série de mesures pragmatiques qui permettent de concilier l’amélioration du pouvoir d’achat des Français avec le principe de réalité auquel sont soumises des TPE-PME : une entreprise ne peut distribuer que ce qu’elle gagne ! Un principe d’autant plus vrai qu’après deux ans de crise Covid et l’inflation qui perdure, leur trésorerie est fragilisée. Nous continuons d’avancer avec la FEP pour défendre les entrepreneurs du secteur de la propreté et leur ouvrir des perspectives, tout au long des prochains mois.
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