La crise sanitaire a accru les opérations de désinfection par voie chimique. Ces opérations exigées par les clients répondaient aux attentes des personnes présentes de travailler dans des lieux sûrs mais suivaient également les recommandations du protocole national, actualisé à de nombreuses reprises par le ministère du Travail, notamment par des interventions plus fréquentes de nettoyage des points de contact des lieux partagés. Ces actions visaient à éviter la contamination manuportée entre une surface contaminée par le virus provenant d’une personne malade et les autres personnes présentes, par le biais des mains ensuite portées au visage et ainsi pénétrant dans l’organisme via les muqueuses (bouche, nez, yeux).
En parallèle de cette crise inédite, le 4e plan national santé environnement, publié en avril 2021, rappelle toutefois que les désinfectants font partie de la catégorie des biocides et qu’il est nécessaire, afin de protéger la santé humaine, animale et environnementale, de s’inscrire dans une démarche d’usage raisonné de leur utilisation. Il est en effet essentiel de limiter leur dispersion dans l’environnement pour prévenir les déséquilibres des écosystèmes ainsi que l’apparition de phénomènes de résistance. Par ailleurs, le coronavirus est un virus dit « enveloppé », sensible à la détergence. Pour améliorer l’approche de l’hygiène des surfaces, il est possible, dans le milieu tertiaire ou dans les lieux recevant du public, d'identifier les micro-organismes pouvant occasionner chez les individus une contamination par manuportage. Quelle est leur sensibilité à la détergence ? Faut-il systématiquement avoir recours à la désinfection ?
Christophe Leclercq, chef de projet, CTIP Conseil
1 Micro-organismes – voies de transmission
Les micro-organismes sont des êtres vivants unicellulaires microscopiques. Une cellule remplit toutes les fonctions : nutrition, locomotion, reproduction… Ils présentent une grande diversité de structures, de formes et de modes de vie, ce qui a donné lieu à leur classement en bactéries, virus, moisissures, levures. Ils ont de nombreuses façons de se multiplier grâce à leur machinerie, en se clonant ou en s'accouplant. Les virus ne sont pas des cellules au sens strict. Ils ne possèdent aucune machinerie leur permettant d'avoir un métabolisme ou de se répliquer par leurs propres moyens. Ils doivent donc pénétrer dans une cellule. Chaque virus cible ses cellules hôtes préférées pour utiliser à son profit la machinerie de celles-ci et lui permettre de se répliquer en de nombreux exemplaires qui sortiront pour gagner chacun une autre cellule. Dans le cas contraire, les virus, incapables de se multiplier à l’extérieur d’une cellule, ne font que survivre un temps limité dans l'environnement avant de se dégrader.
La majorité des micro-organismes sont inoffensifs pour l’humain en bonne santé et n'entraînent pas de maladies. À l’inverse, certains micro-organismes peuvent pénétrer dans le corps humain et entraîner des maladies. Ils sont dits « pathogènes ». Il existe plusieurs voies de transmission :
► la voie respiratoire : les micro-organismes inhalés sont présents dans l'air ;
► la voie cutanéo-muqueuse : les micro-organismes pénètrent en passant à travers de petites lésions de la peau, en portant les mains contaminées aux muqueuses du visage ou encore lors de projections de matières contaminées vers le visage ;
► la voie digestive : les micro-organismes sont ingérés notamment au travers des aliments.
La principale transmission manuportée se fait par le contact direct avec une personne contaminée (poignée de mains, embrassade, …). Une contamination est également possible en portant aux yeux, au nez ou à la bouche, des mains ayant touché des surfaces où se trouvaient des germes pathogènes se transmettant par voies cutanéo-muqueuse ou digestive.
Une étude bibliographique menée par l’INRS, dans le cadre d’un projet initié par le secteur de la propreté, a permis d’identifier certains agents biologiques responsables des maladies infectieuses communautaires à transmission manuportée les plus courantes. Il ne s’agit pas d’une liste exhaustive et il convient de rappeler qu’il n’y a un risque de transmission d’un agent biologique pathogène (bactérie ou virus) que si l’exposition à cet agent coïncide avec le mode de transmission de l’agent.
Toutes ces maladies sont liées à des agents pathogènes à réservoir humain : ils survivent ou se multiplient dans le corps humain, lieu à partir duquel s’effectuent la dispersion et la contamination. Parmi ces maladies infectieuses communautaires, il y a des gastro-entérites virales, des infections respiratoires, des conjonctivites et des infections cutanées.
Le tableau ci-dessous reprend les maladies infectieuses communautaires à transmission manuportée, le type et le nom des micro-organismes responsables.
Maladies infectieuses |
Types |
Noms des micro-organismes responsables |
||
Gastro-entérites virales |
Virus nu (*) |
Norovirus et Rotavirus (dans plus de 80% des cas) |
||
Infections respiratoires |
Rhume commun ou banal |
Virus nu (*) |
Rhinovirus |
|
Bronchiolite et pneumonie |
Virus enveloppé |
Virus respiratoire syncytial |
||
Rhume – syndrome respiratoire aigu |
Virus enveloppé |
Coronavirus |
||
Grippe |
Virus enveloppé |
Virus influenza |
||
Conjonctivites virales |
Virus nu (*) |
Adénovirus |
||
Infection cutanée suppurative (furoncle, panaris) |
Bactérie |
Staphylocoque doré (Staphylococcus aureus) |
2 Stratégies d’intervention
Avant de retenir un protocole d’intervention, il est important de rappeler que la désinfection est efficace uniquement si les surfaces sont dépourvues de souillures, donc nettoyées. De plus, la désinfection n'est efficace qu’au moment de sa réalisation, elle ne perdure pas dans le temps.
En période à faible risque de contamination, un nettoyage régulier des surfaces et des points contacts permet de réduire de façon suffisante la présence de souillures et donc de micro-organismes sur les surfaces. La désinfection n’est alors pas nécessaire hormis dans les sanitaires pour lesquels le Code du travail (article R4228-13) l’impose de façon quotidienne après une opération de nettoyage.
En période à risque plus élevé (cas avéré ou présomption de contamination), pour réduire le risque de contamination, il faut renforcer le nettoyage en augmentant la fréquence de passage sur les points de contacts des lieux partagés, puis procéder à l’évaluation des risques afin d’identifier le type de micro-organisme et connaître l’importance de la contamination. En fonction du type de micro-organisme, il sera alors retenu dans le processus de nettoyage l’usage d’un désinfectant pour les cas avérés de contamination ou lorsque son usage se justifie au regard des micro-organismes visés. En plus de ces recommandations, les agents comme les utilisateurs des locaux doivent être sensibilisés au lavage régulier des mains. Et pour assurer le maintien de la bonne hygiène des locaux, les textiles réutilisables utilisés sont à remplacer régulièrement, laver et sécher en machine.
Les travaux menés en collaboration avec l'INRS, l'IRM (Institut de recherche microbiologique), ainsi que des experts des entreprises de propreté, font l’objet d’une offre dédiée aux entreprises de propreté pour apporter de l’expertise dans l’approche du risque épidémiologique dans les prestations de nettoyage des locaux tertiaires et lieux recevant du public.
À suivre
Bonnes pratiques
En complément du Guide de bonnes pratiques face au Covid-19, la FEP met à disposition 5 fiches protocoles spécifiques aux environnements suivants : parties communes d'immeubles, transports et bureaux…
www.monde-proprete.com rubrique Technique
À savoir
Un parcours de formation 100 % en ligne, financé par le Fare Propreté, a été élaboré pour former un référent prévention des risques épidémiologiques et ainsi renforcer l'expertise des entreprises de propreté sur ce sujet.
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