À partir de 2025, les véhicules thermiques les plus polluants vont être interdits dans les Zones à faibles émissions mobilité (ZFE-m) de plusieurs dizaines d’agglomérations de plus de 150 000 habitants. À l’instar des onze métropoles, dont celles du Grand Paris, qui leur imposent déjà une interdiction ou une limitation de circulation.

Selon Santé publique, la France dénombre chaque année près de 40 000 décès prématurés attribuables aux particules fines (PM10 et PM2,5). Cette pollution atmosphérique, émise par la circulation automobile et le chauffage, est aussi responsable de la dégradation de la fonction pulmonaire, des maladies cardiovasculaires, cancers, etc. Par ailleurs, 7 000 autres décès seraient imputables au dioxyde d’azote (NOx) émis principalement par les véhicules diesel. Irritant pour les bronches, ce gaz favorise, entre autres, les crises d’asthme et les infections pulmonaires. Pour limiter les risques sanitaires posés par les polluants atmosphériques, la loi d’orientation des mobilités (LOM) de 2019 renforcée par la loi « Climat et résilience » de 2021 a créé les zones à faible émission (ZFE ou ZFE‑m). Visant les 43 agglomérations de plus de 150 000 habitants, ce dispositif limite ou interdit la circulation des véhicules les plus anciens et les plus polluants.

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© Man - Man propose un bridage de la vitesse pour son eTGE à l’autonomie de 115 km. Un dimensionnement qui offre la recharge sur borne classique en à peine 5h20.
Man propose un bridage de la vitesse pour son eTGE à l'autonomie de 115 km. Un dimensionnement qui offre la recharge sur borne classique en à peine 5h20.

Différents fonctionnements d’une ZFE à l’autre

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© Ademe - Bernard Hammer, Ademe « On dénombre plus de 300 ZFE notamment à Bruxelles, Londres, Milan ou Lisbonne. »
Bernard Hammer, Ademe « On dénombre plus de 300 ZFE notamment à Bruxelles, Londres, Milan ou Lisbonne. »

En Europe, la France n’est d’ailleurs pas le seul État à avoir pris une telle mesure. « On dénombre plus de 300 ZFE notamment à Bruxelles, Londres, Milan ou Lisbonne », rapporte Bernard Hammer, ingénieur en qualité de l'air et mobilité à la direction régionale d’Île-de-France de l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (Ademe). Dans notre pays, ce dispositif doit être instauré d’ici le 31 décembre 2024 dans les agglomérations concernées. À l’exception de celles qui peuvent démontrer « que les concentrations moyennes annuelles en dioxyde d’azote (NO2) sont inférieures ou égales à 10 μg/m3 ». Les territoires restant soumis à cette obligation ont toute liberté pour en définir le périmètre, le déploiement, les dérogations. D’où, des différences de fonctionnement d’une ZFE à l’autre comme le montre le site ZFE. green. En outre, un comité de suivi a été nommé par le ministère de la Transition écologique et de la Cohésion des Territoires, afin d’accompagner la mise en place des ZFE et favoriser la coordination des mesures.

Sur les 43 agglomérations concernées, onze ont été jugées prioritaires du fait de la concentration élevée de polluants atmosphériques. Ce qui les a obligées à déployer leur ZFE avant le 31 décembre 2020. « Depuis, sur ces onze agglomérations, sept se trouvent désormais en dessous des seuils de concentration fixés par la réglementation », rapporte Chantal Derkenne, ingénieur au service de la qualité de l’air à l’Ademe. Ces niveaux vont d’ailleurs sûrement être modifiés à l’horizon 2030 par la Commission européenne. Concernant les quatre agglomérations restantes et en dépassement de seuils réguliers, elles restent soumises au calendrier national. Lequel interdit, a minima, la circulation des véhicules non classés et ceux estampillés Crit’Air 5 (véhicules diesel immatriculés entre 1997 et 2000) et les non classés. Soit 250 000 véhicules et utilitaires pour les onze ZFE. L’an prochain, cette interdiction va s’étendre aux Crit’Air 4 (diesels immatriculés entre 2001 et 2005) et dès le 1er janvier 2025 aux Crit’Air 3 (diesels produits avant 2011 et essence avant 2006). Avec l’interdiction de circulation, se pose la question du contrôle des véhicules. À partir de l’été 2024, le gouvernement a prévu de mettre en place des radars automatiques. Ces appareils seront chargés de lire les plaques d’immatriculation afin de vérifier la conformité de la classe du véhicule. Les contrevenants seront passibles d’une amende de 68 €.

16 000 € d’aides maximum

Pour accompagner le déploiement des ZFE, des aides nationales et locales sont prévues afin de faciliter l’acquisition d’un véhicule alternatif neuf ou d’occasion par les professionnels et les particuliers, en remplacement d’un véhicule ancien. Pour en bénéficier, certains dispositifs tels que la prime à la conversion imposent que ce dernier soit mis au rebut. En complément de cette aide, les collectivités territoriales peuvent proposer des surprimes. « Dans le meilleur des cas, le cumul des aides peut atteindre 15 000 à 16 000 € pour les véhicules légers (jusqu’à 3,5 t) », reprend Chantal Derkenne. Le frein à l’acquisition des véhicules propres n’est pas seulement une question de financement. Avec la pénurie de composants électroniques et de matières premières, le secteur automobile a du mal à répondre à la demande. Ce qui se traduit par une carence de l’offre ou des retards de livraison. Ces problèmes font d’ailleurs partie des dérogations prévues par certaines ZFE comme à Rouen. Autre accompagnement possible, à l’Eurométropole de Strasbourg, les professionnels peuvent trouver conseil auprès de l’Agence du climat qui fait office de guichet unique pour délivrer des solutions, notamment en matière de mobilité.

 Achat VS véhicule financé

Face à l’augmentation du prix des véhicules neufs, les entreprises privilégient les formules locatives sur le crédit auto. Objectif : mieux prévoir les coûts, sans s’engager à trop long terme sur un type de motorisation. Complexification des véhicules, augmentation du nombre d’équipements, flambée du coût des matières premières et des composants électroniques… « le prix moyen d’une voiture a bondi, entre 2010 et 2022, de 19 800 € à 32 000 €, remarque Julien Billon, DG d’Aaa Data, un cabinet d’analyse de la donnée. D’où la bascule de l’achat propriétaire en crédit auto (72 % en 2011, 43 % en 2022) vers le véhicule financé par formule locative (23 % en 2011 contre 52 % en 2022). Et ce, à égalité entre particuliers et entreprises. »

Qu’il s’agisse de location avec option d’achat (LOA), location longue durée (LLD) ou crédit-bail (pour les entreprises), on loue l’usage au lieu d’acheter un véhicule. Le loueur et le locataire s’entendent alors sur le choix du véhicule, son prix d’achat, la durée de location, le nombre de kilomètres prévus ainsi que sur le montant du loyer. Particularité de la LOA et du crédit-bail, le locataire restitue le véhicule en fin de bail ou le rachète.

« Dans tous les cas, c’est le loueur qui prend 100 % du risque de revente du véhicule. Pas l’utilisateur », précise Jean Mateos, responsable VUL chez Arval, spécialiste de la location longue durée (LLD). Cette prise de risque va plus loin : « Les aménagements des VUL ainsi que des équipements relativement standard comme les ridelles, les plateaux ou les plateaux-grues », souligne Laurent Petit, responsable marketing d’Alphabet en France, spécialiste de la LLD dans 30 pays. Mieux vaut quand même, pour le locataire, contracter toutes les extensions de garantie d’assurance ainsi que le contrat d’entretien et d’assistance proposés par le loueur pour que le véhicule soit en bon état à la remise.

« En cours de contrat, le locataire peut ajuster à la hausse ou à la baisse la durée de location ou le kilométrage, en fonction de la conjoncture », reprend le responsable marketing d’Alphabet dont 40 % des véhicules commandés en 2022 sont hybrides rechargeables ou électriques. De quoi prévoir les coûts en toute souplesse, sans s’engager à long terme sur une motorisation qui risque de devenir obsolète.

Les 4 métropoles les plus polluées

S’y retrouver dans les modalités de fonctionnement des ZFE est un véritable casse-tête. Et pour cause, d’une agglomération à l’autre, les règles d’applications divergent. En témoignent Aix-Marseille, Lyon, Rouen et Paris - Métropole du Grand Paris (MGP) - considérées comme les quatre agglomérations les plus polluées de France. Point commun, la circulation des véhicules non classés et les Crit’Air 5 y sont déjà interdits. Dans la MGP, l’interdiction s’étend aux Crit’Air 4 et devrait se poursuivre avec les Crit’Air 3 en 2024. Des dérogations locales sont prévues. Notamment pour les véhicules ayant sur leur carte grise la mention VTSU (véhicule très spécialisé à usage divers). Concernant le renouvellement des véhicules anciens, dont les camionnettes, la MGP accorde une aide allant jusqu’à 6 000 € pour l’achat d’un véhicule alternatif neuf ou d’occasion. Ce dispositif est cumulable avec la prime à la conversion (jusqu’à 6 000 € pour un véhicule électrique ou hydrogène auxquels s’ajoute une surprime de 1 000 € si l’on travaille en ZFE) ou avec le bonus écologique (jusqu’à 8 000 € pour une camionnette sous condition de revenus) accordé par l’État.

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© Nissan - Le Nissan Townstar dispsoe d'un chargeur caméléon de 11 kW triphasé, qui s’adapte à tous types de charge domestique à courant alternatif.

Lyon : déploiement progressif

La Métropole du Grand Lyon se distingue par un déploiement progressif de sa ZFE, d’abord sur un périmètre central puis sur le reste du territoire. Alors que les non classés (NC) et les Crit’Air 5 sont déjà bannis dans le périmètre central, la règle s’appliquera au Crit’Air 4 à compter du 1er septembre. L’interdiction concernera le reste du territoire au 1er septembre 2024. À cette date, les Crit’Air 3 se verront interdire le périmètre central puis, à partir de 2025, toute la ZFE. Concernant les aides aux professionnels, celles-ci varient en fonction du véhicule à remplacer. Soit de 10 000 à 13 000 € pour un poids lourd (PL) et de 5 000 à 8 000 € pour un utilitaire léger (VUL). Une majoration de 1 000 € est attribuée en plus de ces aides si le professionnel se débarrasse de son véhicule. L’ensemble des aides est accessible au plus tard le 1er septembre 2023.

Mesures locales spécifiques

Dans la Métropole de Rouen où les NC et les Crit’Air 4 et 5 sont interdits, les TPE peuvent recevoir une aide de 2 000 € pour une mise au rebut afin de remplacer un VUL ou PL. Pour faciliter la vie des entreprises, la métropole a néanmoins prévu d’accorder des dérogations aux véhicules de type benne jusqu’au 30 juin 2024. Quant à la Métropole d’Aix-Marseille Provence, elle décerne des dérogations locales et à durée triennale pour certaines catégories de véhicules dont font partie les engins de chantier. Pour en bénéficier, il est nécessaire de faire une demande motivée en ligne, indique la métropole dont le calendrier prévoit une interdiction des Crit’Air 4 en septembre 2023 et celles des Crit’Air 3 en septembre 2024. En complément des aides d’État, sont prévus des soutiens accordés localement aux professionnels. Par exemple un chèque de 500 € pour la fourniture et la pose d’un dispositif de conversion au bioéthanol, et ce dans la limite de 50 % du coût.

 L'avenir du retrofit

Face à la pénurie de véhicules neufs, convertir un VUL en électrique, GNV, biocarburant ou encore hydrogène constitue une voie d’avenir. Une opération moins coûteuse que d’acheter un équivalent neuf. Et surtout, elle permet de conserver le graphisme publicitaire sur la carrosserie ainsi que les aménagements intérieurs.

En matière de retrofit électrique, l’opération consiste à remplacer le bloc-moteur, le radiateur et le pot d’échappement par un kit de conversion. Ce dispositif comprend notamment le moteur électrique, le convertisseur et les batteries. Pour autant, il ne suffit pas à un professionnel d’installer un kit sur un véhicule pour qu’il ait le droit de circuler sur les routes. En effet, il faut passer une homologation de série délivrée par l’Utac, l’organisme désigné par l’État pour vérifier la conformité des transformations. Un processus long et coûteux (plusieurs centaines de milliers d’euros). Résultat, l’offre se limite aux modèles les plus courants dont un Renault Trafic proposé par l’entreprise Tolv (anciennement Phoenix Mobility). Laquelle figure parmi la quinzaine d’acteurs français du secteur. Dont Rev Mobilities qui entamera son processus d’homologation en novembre pour les Renault Master, Fiat Ducato et Citroën Jumper. « Disponible en mode locatif, notre kit délivrera une autonomie de 180 km », indique Damien Picherau, directeur associé.

Pour un VUL, le coût moyen d’une conversion électrique, batterie comprise, varie de 25 000 à 35 000 €. Néanmoins, les propriétaires qui veulent sauter le pas peuvent bénéficier d’aides publiques. À commencer par la prime au retrofit électrique accordée par l’État qui va jusqu’à 7 000 € pour un véhicule de classe II et à 9 000 € pour un classe III. À cette prime s’ajoutent des aides venant de certaines collectivités et de ZFE, à l’instar de Rouen ou de Strasbourg. Cette dernière accorde une aide de 4 000 à 8 000 € selon la taille du VUL. Ce financement peut être cumulé aux aides de l’État et de la région Grand Est.

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