
La technologie de la vapeur est utilisée dans le bionettoyage depuis plusieurs dizaines d'années. Elle connaît un essor assez linéaire. Avec la crise sanitaire, les professionnels observent un intérêt plus fort. « On assiste à beaucoup d'extrapolations autour de cette solution qui est très intéressante pour combattre le coronavirus, estime Olivier Haution, codirigeant de la société Deppik, spécialisée dans la maîtrise de la contamination en salles blanches avec une forte orientation environnementale. La problématique du relargage du virus dans l'air avec la vapeur est absolument erronée. »
Chez Deppik, la demande augmente progressivement dans les secteurs santé (laboratoires, blocs) et de nouveaux secteurs comme la petite enfance et les entreprises de propreté. « Celles-ci, souvent très spécialisées, achètent un ou deux appareils tandis que les établissements de santé commandent des volumes plus conséquents, ajoute Olivier Haution. Mais la vapeur reste un marché de niche. » L'entreprise propose trois modèles sous la marque One Care Steam : un petit appareil de la taille d'un aspirateur pour des temps d'utilisation d'1 heure, un modèle sur chariot bénéficiant d'une autonomie de 3 à 4 heures, une grosse machine installée sur un chariot inox capable de travailler de 10 à 12 heures par jour.
Pour Pascal Queyrel, directeur commercial de Sanivap (groupe Oxypharm), la vapeur s'inscrit avant tout dans une démarche écologique respectueuse des personnes et de l'environnement. « Depuis 1996, Sanivap a travaillé sur la technologie de la vapeur, affirme-t-il. Elle permet de nettoyer et de désinfecter selon un principe physique qui fait appel à la température. » Le principal intérêt est de ne pas avoir besoin de détergent.
Sanivap compte aujourd'hui 10 000 machines sur le terrain. Le fabricant travaille avec des sociétés comme Tarkett ou Gerflor, ainsi qu'avec des entreprises de propreté comme Sodexo ou Elior. « Certaines entreprises de propreté ont compris que la vapeur avait sa place, notamment dans le domaine médical ou les crèches »,
SÉBASTIEN LARGE, KÄRCHER
Demande en hausse
« L'avantage du nettoyage avec une centrale vapeur est de procurer un lavage efficace sans détergent en utilisant la chaleur pour nettoyer, confirme Sébastien Large, chef de produits chez Kärcher. Il s'agit là d'une solution de nettoyage écologique des surfaces dures. »
« Avant, l’utilisation de la vapeur était essentiellement une demande émanant du secteur de la santé, comme les hôpitaux, ou des crèches, pour le nettoyage et la désinfection. Et c’était également une volonté de tendre vers une démarche plus écologique, observe Sébastien Large. Aujourd'hui, cette demande provient de secteurs plus élargis. » Pour lui, il existe une réelle prise de conscience de l'efficacité de la vapeur quant à cette double utilisation. On assiste donc à une augmentation de la demande pour les solutions de nettoyage à la vapeur. « Les clients sont de plus en plus demandeurs dans l'industrie, les maisons de retraite, les collectivités, les cuisines professionnelles, les écoles ou encore la GMS », note Sébastien Large.
La vapeur s'inscrit avant tout dans une démarche écologique respectueuse des personnes et de l'environnement.
Numatic International observe une augmentation des demandes pour lutter contre le Covid-19.
Les ventes progressent aussi chez Sanivap qui a multiplié par trois sa production. Au départ surtout utilisée en santé - qui représente 70 % des ventes du fabricant -, la vapeur voit ses applications progressivement s'élargir. « En cuisine par exemple sur les inox, la vapeur est particulièrement adaptée, poursuit Pascal Queyrel, car elle ne laisse ni traces ni résidus et dispose d'un haut pouvoir dégraissant. »
Pour quelle désinfection ?
« La souillure est mise en suspension, explique Pascal Queyrel. On a d'abord montré que la vapeur nettoyait puis qu'elle permettait une réduction momentanée des micro-organismes. Nous avons ensuite commencé à travailler avec l'Afnor pendant une dizaine d'années sur les données scientifiques et les protocoles de validation. » La norme NFT 72-110 a été publiée le 19 mars 2019 : elle prouve que la vapeur a les mêmes propriétés qu'un désinfectant. « Il faut faire attention quant à l'utilisation d'un détergent désinfectant sur les surfaces, prévient le spécialiste. Cela ne revient pas vraiment à nettoyer, puis à désinfecter. Pour respecter les techniques, il faut pratiquer un balayage humide, utiliser un détergent, rincer, appliquer un désinfectant puis rincer encore. La première des solutions est de bien nettoyer. »
« Un protocole précis doit être suivi pour assurer une utilisation optimale de l'équipement. Il faut prendre en compte le couple machine-accessoires », souligne Olivier Haution. Un débit de 10 cm/s est préconisé par la norme couvrant la désinfection des surfaces par la vapeur d'eau (NFT 72-110). La cadence de travail a également son importance, ainsi que la température qui dépasse 120 °C.
« La NFT 72-110 est une norme française homologuée par l'Afnor pour le procédé de désinfection à la vapeur. Elle est utilisée en santé ou dans l'agroalimentaire », précise Sébastien Large.
Le principe physique de la chaleur a un effet bactéricide, fongicide et virucide. « Avec la vapeur, on élimine la majorité des germes, souligne Sébastien Large. Nous avons demandé à un laboratoire extérieur de réaliser le test 4 zones selon la norme européenne Afnor EN 16615 sur nos machines SG 4.4. Résultat : les tests ont démontré que, pour un nettoyage localisé pendant 30 secondes, avec le niveau maximal de vapeur et un nettoyeur vapeur professionnel Kärcher, 99,999 % des virus enveloppés comme les coronavirus ou la grippe (à l'exclusion du virus de l'hépatite B) peuvent être éliminés sur les surfaces dures et lisses courantes (virus-test : virus modifié de la vaccine Ankara). »
La méthode associe la chaleur, la durée et une buse à main équipée de microfibre. « Dans le cas de la désinfection du SARS Cov2, il est important de respecter certaines étapes : nettoyer et désinfecter la centrale vapeur et de porter les EPI. Puis, il faut dissocier le nettoyage et la désinfection, explique Sébastien Large. Il n’y a pas de désinfection sans nettoyage préalable de la surface. Un nettoyage en profondeur est indispensable. Une fois le support nettoyé, trente secondes sont nécessaires sur zone pour désinfecter le virus SARS Cov2. C'est une désinfection d'appoint comme sur les poignées de porte par exemple, mais la vapeur n'est pas vraiment adaptée aux grandes surfaces. » Les centrales vapeur sont vendues avec des accessoires (buses, manche, microfibre, brosse, raclette) pour plus de polyvalence dans les applications. Les prix de la gamme professionnelle de Kärcher varient de 1 100 € pour la machine basique à 4 500 € HT pour les centrales aspirantes.
OLIVIER HAUTION, DEPPIK
« Les solutions à base de vapeur fonctionnent bien sur le biofilm et sont intéressantes dans le cadre du bionettoyage, indique Olivier Haution. Elles sont indiquées dans le nettoyage ou la désinfection des surfaces planes, des équipements et des sols (hormis les moquettes). » Les cadences sont plus soutenues pour le nettoyage que pour la désinfection qui nécessite une phase de travail méticuleuse. Des appareils identiques sont utilisés pour ces différentes opérations. Le bionettoyage, la désinfection et la mise à blanc de salles blanches à l'aide de la vapeur exigent une formation, comme la plupart des solutions alternatives à la détergence. « Pour réussir la mise en œuvre de cette méthode, la formation est indispensable. C'est particulièrement le cas dans la santé où un rappel est nécessaire une à deux fois par an », insiste le spécialiste. Dans les entreprises de propreté, il faut des référents hygiène pour assurer la bonne mise en œuvre de cette solution.
Des contraintes et des freins
Les principales contraintes de la vapeur sont la présence du câble électrique et du tuyau vapeur. L'avantage est d'éviter l'utilisation de produits chimiques. « Plus on y passe du temps, meilleur est le résultat », ajoute Olivier Haution. Globalement la solution est satisfaisante même en environnement exigeant comme les salles blanches où des mesures de propreté sont réalisées. Les intervalles de nettoyage sont plus espacés. Pour les sols durs, il est possible d'utiliser des centrales vapeur ou des machines à rouleaux. La Numatic Duplex Steam Plus peut être aussi utilisée dans les salles blanches.
Un autre point faible de la vapeur est la problématique du calcaire. « La vapeur n'agit pas sur le calcaire, indique Olivier Haution. Afin de protéger la résistance de la centrale du calcaire présent dans l'eau du réseau, on utilise un osmoseur qui produit de l'eau déminéralisée utilisée ensuite sur les surfaces. » En cas de forte présence de calcaire dans des cas extrêmes, il est possible d'ajouter une petite quantité de produits chimiques pour préparer les sols. Dans ce cas, la norme NFT 72-110 n'est plus applicable.
BRUNO AUGUSTE, NUMATIC INTERNATIONAL
L'investissement dans des matériels de production de vapeur est aussi freiné par les questions de budget : une centrale coûte entre 4 000 et 5 000 €. « Nous proposons des machines un peu moins chères pour les petites applications et nous mettons progressivement en place un système de location », ajoute Pascal Queyrel. D'autres freins existent aussi comme l'encombrement ou la méconnaissance de la technologie. Sanivap fabrique entièrement en France ses appareils intégrant une chaudière. La vapeur est mise sous pression puis transformée en gaz légèrement humide. Avec un débit constant, la température est comprise entre 158 et 160 °C dans la chaudière, pour 95 à 98 °C à la sortie des accessoires. Le fabricant préconise d'utiliser une eau filtrée par des filtres piégeant les carbonates.
© Deppik - Le secteur médical reste le premier utilisateur de la vapeur.
© Sanivap - Sanivap est le seul fabricant à produire l’intégralité des machines en France.
Des évolutions technologiques
« D'une manière générale, l'utilisation de la vapeur se démocratise et les applications s'élargissent avec des sols et des niveaux de saleté différents », observe Olivier Haution. Des avancées technologiques récentes ont permis de limiter le nombre d'accessoires des appareils de production de vapeur. Trois ou quatre suffisent aujourd'hui à couvrir 90 % des besoins. Grâce à la fonction de remplissage en continu, l'opérateur n'a plus besoin de s'arrêter et peut travailler jusqu'à 10 heures par jour, notamment pour les mises à blanc.
« Au départ, les générateurs de vapeur étaient compliqués à mettre en route et peu ergonomiques, témoigne Pascal Queyrel. Il a fallu du temps pour comprendre les besoins. » Aujourd'hui, les outils sont ergonomiques et des protocoles ont été mis en place pour une meilleure optimisation du temps. Sanivap a aussi réduit la taille des poignées qui sont plus ergonomiques, tactiles et tournantes. Le déplacement des appareils a été facilité. Utilisables jusqu'à 10 heures par jour, ils font preuve de fiabilité.
Il existe des solutions alternatives à ce type d'appareils, pour un investissement moindre et une mise en œuvre moins contraignante.
Kärcher a conçu une gamme pour les professionnels pour le nettoyage et la désinfection des surfaces, qui est constituée de trois modèles disposant d’un réservoir d'eau propre pouvant être rempli en continu pour une autonomie illimitée. Le modèle SG 4/4 est une centrale vapeur standard qui génère de la vapeur à 100 °C tandis que les SGV 6/5 et SGV 8/5 disposent de la fonction d’aspiration en supplément. Possédant une fonction autonettoyante, la SGV 8/5 est aussi utilisable en tant qu’injecteur/extracteur avec de l’eau chaude ou de l’eau froide et un détergent associé.
Démocratiser l'usage
Essentiellement orienté sur la production d'aspirateurs et d'autolaveuses, Numatic International propose deux machines basées sur le concept de la vapeur. « Nous avons cherché à proposer des matériels plus généralistes, indique Bruno Auguste, chef des ventes. Contrairement à nos confrères, nous ne ciblons pas particulièrement le domaine hospitalier. » Les nettoyeurs vapeur Nusteam Pro s'adressent davantage à l'hôtellerie-restauration, aux collectivités et aux entreprises de propreté. L'objectif du fabricant est de mettre à disposition des professionnels des process de nettoyage plus simples. « Or, la mise en œuvre de certains appareils à vapeur est lourde, note Bruno Auguste. Notre position est différente : nous visons à démocratiser l'usage de la vapeur via notre réseau de distribution. »
Nusteam Pro 6 est un appareil qui produit à la fois de la vapeur sèche et de la vapeur humide. Il bénéficie d'une simplicité d'utilisation et permet de nettoyer, dégraisser et désinfecter les surfaces, sols, vitres, robinetterie… Il est disponible avec six accessoires (frange, microfibre, raclette…). La Duplex, machine de nettoyage à rouleaux, existe en version vapeur pour le nettoyage des sols durs et des moquettes. La température atteint 130 °C en sortie de cuve, 110 °C sur les sols. « Le Nusteam Pro 6 est adapté à des applications plus pointues, de désinfection notamment », souligne Bruno Auguste. La Duplex à vapeur est préconisée pour le nettoyage et l'assainissement des sols pour les surfaces moyennes (150 à 250 m²/h). Elle rencontre un vif succès puisque 70 % des ventes de Duplex concernent le modèle à vapeur. Il existe une forte attente du marché quant à l'aisance d'utilisation, la rapidité de mise en œuvre et la maniabilité de l'appareil. « On peut aussi combiner la Duplex vapeur et le générateur pour réaliser une désinfection complémentaire, complète Bruno Auguste. Le concept vapeur a la cote mais les entreprises de propreté doivent pouvoir investir. C'est pourquoi elles s'orientent davantage vers la Duplex. »
© Numatic - Nusteam Pro 6 est un appareil qui produit à la fois de la vapeur sèche et de la vapeur humide.
© Duplex - est préconisée pour le nettoyage et l’assainissement des sols pour les surfaces moyennes (150 à 250 m²/h).
NOTE
Depuis mars 2019, la norme Afnor NFT 72-110 sur les procédés de désinfection des surfaces par la vapeur avec ou sans contact détermine l'activité bactéricide, fongicide, levuricide, sporicide et virucide incluant les bactériophages.
120
Sans minéraux et conductivité électrique, la vapeur à 120 °C neutralise la charge statique des particules de poussière. Grâce à la température élevée, elle décolle et dissout la saleté, détache et capture toutes ses particules : graisse, allergènes et acariens.
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